• Nigeria: à Maiduguri et autour du bassin du lac Tchad, le retour de la sécurité ravive l'économie [1/2]
    Mar 10 2025

    Quinze ans après le déclenchement de l'insurrection de Boko Haram, la situation s'est sensiblement améliorée autour du bassin du lac Tchad, avec le retour de millions de déplacés et de réfugiés dans leur communauté d'origine. Si le groupe armé nigérian affilié à l'État islamique s'est essentiellement replié sur des îles du lac Tchad et dans certaines poches terrestres où ils vivent de racket, ailleurs, ce sont des pans entiers de ce grand bassin géographique qui renaissent économiquement. Certains observateurs locaux estiment que depuis fin 2020, Maiduguri redevient un hub économique. La capitale du Borno, dans le Nord-Est du Nigeria, est notamment traversée par plusieurs axes, globalement débarrassés de la menace Boko Haram. Ils mènent à l'Est du Tchad, au Nord du Niger, et bien sûr au Sud du Cameroun.

    De notre correspondant à Maiduguri,

    Bientôt 20 ans qu'Abdullahi sillonne la route Maiduguri-Gamboru menant au Tchad. Ce commerçant convoie des véhicules achetés à Lagos, au Nigeria, pour des clients en roulant sur cet axe jusqu'au Soudan. Entre 2013 et 2016, il est contraint à l'arrêt, car Boko Haram occupe alors de nombreuses localités sur les 148 kilomètres entre Maiduguri et Gamboru.

    « Nous sommes en mesure de circuler sur cette route en toute tranquillité d'esprit »

    Courant 2016, lorsque cette route a réouvert, Abdullahi a repris son activité sous escorte militaire, malgré les risques : « Nous devions garer notre voiture près de ce panneau de bienvenue, puis attendre l'arrivée de militaires de leurs casernes. Plusieurs véhicules militaires à l'avant, d'autres à l'arrière, nos voitures au milieu... Et nous roulions ainsi jusqu'à la frontière de Gamboru. Les militaires s'arrêtaient là car nous étions suffisamment en sécurité pour continuer notre trajet sans escorte. Puis, au retour, en arrivant à la frontière de Gamboru, on devait attendre de nouveau l'escorte. »

    Depuis 2022, certaines semaines, Abdullahi et son équipe livrent jusqu'à une dizaine de véhicules SUV, car la route A3 subit de moins en moins d'attaques : « Six ou sept checkpoints. Ce sont les principaux points de contrôle habituels. Les militaires descendent et procèdent à des vérifications. Vous devez payer les taxes imposées. Progressivement, nous sommes en mesure de circuler sur cette route en toute tranquillité d'esprit. »

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    La clientèle étrangère encore frileuse pour se rendre Gamboru

    Au milieu de Gamboru Market, Alhaji Umar vend en gros du tissu wax. Malgré la nette amélioration de la sécurité dans Maiduguri, sa clientèle étrangère reste angoissée à l'idée de venir sur place : « Mes clients du Tchad et du Cameroun ne viennent plus ici comme avant à cause de Boko Haram. Mais nous communiquons avec eux via WhatsApp. Ils choisissent ce dont ils ont besoin et nous leur livrons. Dans l'autre sens, certains commerçants traversent la frontière avec des marchandises à livrer ici de temps en temps. En raison de l'insurrection, ce n'est plus fréquent. »

    Mais Alhaji Umar reste optimiste, car grâce à la réduction des attentats kamikazes, au moins, ses clients locaux se déplacent jusqu'à sa boutique pour négocier en direct.

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  • «Tierra Firme», un programme espagnol pour l'emploi local au Sénégal
    Mar 8 2025

    Au Sénégal, la Chambre de commerce espagnole a mis en place un programme de formations professionnelles pour les jeunes comme alternative à la migration irrégulière. Après une formation dans les métiers du bâtiment ou encore du textile, de l’agriculture et du tourisme, les étudiants sont envoyés en stage dans des entreprises espagnoles ou sénégalaises au Sénégal, avec une possibilité d’embauche derrière. « Tierra Firme », ou « terre ferme » en français, veut donc créer de l’emploi localement pour encourager le développement du pays.

    De notre correspondante à Dakar,

    Dans la section bâtiment, ils sont 95 en formation. Certains avaient déjà une petite expérience, formés sur le tas, d’autres viennent d’univers très différents comme Khadidiatou Sambou, infirmière de 28 ans : « Au Sénégal, c'est trop difficile d'avoir un boulot. J'étais tout le temps en stage. J'ai fait ça pendant trois ans. » Elle a choisi la spécialisation échafaudage, espérant trouver rapidement un emploi à la fin : « On a tout le temps des nouvelles constructions à Dakar. C'est pourquoi je me suis dit : "Pourquoi pas tenter ma chance, après l'obtention d'un diplôme, pour trouver quelque chose de meilleur." »

    L’ONG sénégalaise Help For Migrants a aidé à recruter les élèves. Parmi plus de 1 000 candidatures, ils ont ciblé des profils qui pouvaient être tentés par la migration irrégulière et des migrants de retour comme Mansour Soumaré. Il a tenté trois fois de rejoindre l’Europe par l’océan, rêvant de devenir footballeur professionnel, sans succès. « À la suite de toutes ces expériences, j'ai pris la décision de laisser tomber la migration, de rester au pays et de suivre une formation professionnelle. Je me suis ainsi dit qu'avec cela, je pourrais peut-être trouver le moyen de voyager légalement », confie-t-il.

    Après les trois mois de formation, les apprentis auront trois mois de stage dans les entreprises espagnoles et sénégalaises membres de la Chambre de commerce d’Espagne au Sénégal. À la clé, des embauches en CDI si tout se passe bien. L’idée du programme financé par le gouvernement des Canaries est donc de créer de l’emploi pour dissuader les jeunes de prendre les pirogues vers l’archipel espagnol, mais aussi de répondre aux besoins en personnel de ses entreprises partenaires. « Il y a beaucoup d’entreprises qui nous ont transmis qu’elles cherchaient du personnel et que c'était difficile de trouver du personnel qui a reçu une formation adaptée aux besoins réels du marché, rapporte Paula Medina Agromayor, secrétaire générale de la Chambre de commerce Espagne-Sénégal et coordinatrice du programme Tierra Firme. On travaille avec le centre de formation, avec les critères que nous a transmis l'entreprise, pour créer des profils les plus adaptés aux besoins de l'entreprise. »

    Dans une autre salle, les élèves de la spécialité électricité valident une épreuve technique. Le directeur de la structure de formation 2IFA, Ismaïla Thioub, voit la demande en ouvriers qualifiés exploser : « Partout, les gens commencent à construire en hauteur, et quand on parle de construire en hauteur, ben là, c'est la netteté, c'est le professionnalisme. Quelqu'un qui n'est pas formé, comment il doit construire l'immeuble à six ou sept étages ? Là, ça va être très compliqué. »

    À la fin du programme pilote en 2024, tous les jeunes formés avaient trouvé un emploi. Deux cent cinquante personnes bénéficient du programme cette année.

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  • Côte d’Ivoire: portraits croisés d’aiguilleuses du ciel
    Mar 7 2025

    En cette Journée internationale des droits des femmes, focus sur des personnalités qui tentent de percer dans des domaines traditionnellement réservés aux hommes, comme l’aviation. La Côte d’Ivoire compte à peine huit femmes qui exercent comme contrôleur de la circulation aérienne. Portraits croisés d’aiguilleuses du ciel par notre correspondante à Abidjan.

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  • Tchad: suite aux inondations de 2024, les sinistrés ne sont toujours pas relogés
    Mar 6 2025

    Pendant l’été 2024, le Tchad a subi les pires inondations de son histoire. Elles ont fait près de 600 victimes et affecté environ 2 millions de personnes. Des pluies diluviennes, exacerbées par le réchauffement climatique, ont fait déborder les fleuves Logone et Chari et ravagé des quartiers entiers de la capitale. Un peu plus de six mois après, comment vivent les milliers de sinistrés tchadiens ? Et comment s’adapter à un phénomène qui devrait se reproduire et s’amplifier dans les années à venir ?

    De notre envoyé spécial de retour de Ndjamena,

    Devant le calme et la beauté des lieux le long du fleuve Logone, difficile d’imaginer l’ampleur des inondations de 2024 au Tchad. « Tout le village a été inondé. Même nos champs ont été inondés. Même l’école a été inondée, se souvient Mathieu Njilbé, le délégué du quartier de Kabé. Avant, il y avait déjà eu des inondations, mais pas comme cette année. Il y en avait un peu, mais celles de 2024 nous ont dépassés. »

    90% du quartier ravagé par les eaux, les habitants ont fui, au Cameroun, de l'autre côté du fleuve, ou à l’intérieur des terres. Et sans ressources, il est impossible aux sinistrés de reconstruire leur maison. « Jusqu’à aujourd’hui, à l’heure où je vous parle, certains ne peuvent pas rentrer chez eux, car ils n’ont pas d’abri pour poser la tête », déplore Mékunda Gargoulai, qui vit dans un hangar improvisé avec ses 12 enfants.

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    « Nous sommes tellement nombreux que les abris construits ne nous contiennent pas »

    Pour reloger les milliers de sinistrés, des camps ont été construits, comme celui où vit Nojimbadoum Nanidoum, mère de six enfants et veuve. Sur ce site, ce sont pas moins de 34 000 personnes qui sont accueillies dans des conditions précaires. « Nous sommes arrivés ici le 25 octobre. Mais nous sommes tellement nombreux que les abris construits ne nous contiennent pas, alerte-t-elle. Certains sont obligés d’habiter des abris de fortune. La vie ici est vraiment dure. Chacun se bat pour essayer de nourrir sa famille. »

    Manque de nourriture, absence de maternité et d’école, une fois encore, femmes et enfants demeurent les principales victimes. Une question se pose alors : comment continuer à vivre au bord du fleuve ? « Où peut-on aller ? Nous, nous n’avons pas les moyens d'acheter un terrain ailleurs, explique Mathieu Njildé. Donc, on va vivre ici, pour toujours. » « On a peur, renchérit cette sinistrée. On a l’inquiétude que, pendant l’année 2025 ou 2026, les inondations soient plus élevées encore ».

    S'adapter au changement climatique

    Pour Robert de l’ONG Caidel, le centre d’appui aux initiatives de développement locales qui vient en aide aux sinistrés, une seule solution : « Avec ce changement climatique, finalement, ils sont obligés maintenant de changer et de s’adapter à ce climat. »

    Construire des maisons plus solides, adapter les cultures, les défis sont nombreux et les besoins énormes. Alors le président des sinistrés de Kabé lance un appel : « Quand la population souffre d’une telle manière, il faut faire comment ? C’est la population de l’État. Il faut que le gouvernement tchadien pense aussi à cette population. »

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  • Que peuvent attendre les cyclistes africains des Mondiaux qui se dérouleront au Rwanda?
    Mar 5 2025

    Les prochains championnats du monde sur route sont prévus fin septembre à Kigali, une grande première pour l’Afrique. Face aux meilleurs de la planète, quel rôle peuvent espérer jouer les coureurs et coureuses du continent ?

    De notre envoyé spécial à Kigali,

    Le classement final du 17ᵉ Tour du Rwanda laisse apparaître de belles promesses : 3 coureurs africains dans le top 10, un jeune Rwandais, Vainqueur Masengesho, est arrivé en 7ᵉ position. Mais aux Mondiaux, avec des Pogacar ou Vingegaard annoncés, la concurrence sera bien plus relevée. De plus, le parcours pourrait être un « mini Paris-Roubaix à l’africaine », selon David Louvet, l’entraîneur de l’équipe du Rwanda depuis 2023.

    Paris-Roubaix donc pour les pavés, la distance, 270 km, à cela s’ajoute l’altitude et de nombreuses ascensions. Un cocktail qui fait de ces Mondiaux les plus durs, peut-être, de l’Histoire. « Avoir un Africain à l’arrivée, c’est sûr que ça va être compliqué, juge David Louvet. Au niveau du classement, moi, je pense qu’on peut reprendre celui de l’année dernière et on aura les mêmes coureurs à l’arrivée. » C’est-à-dire Tadej Pogacar, loin devant et pas grand monde à l’arrivée.

    À Zurich, où s’est disputée la dernière édition, le parcours très vallonné avait eu raison des sprinteurs. Même Biniam Girmay, maillot vert du dernier Tour de France, avait jeté l’éponge en cours de route. Alors que fera l’Érythréen cette année ? Peut-il lui, le grand coureur que l’Afrique attendait, zapper les premiers Mondiaux sur le continent ? Tout est possible, disait-il à notre micro fin janvier. Aujourd’hui, l’hypothèse impasse semble la plus avancée. « On a discuté ensemble, la Fédération, le ministère des Sports et Biniam, explique Samson Solomon, sélectionneur de l'Érythrée. J’aimerais qu’il soit au départ de ces Mondiaux, le gouvernement, le peuple, tout le monde aimerait ! Mais c’est son choix. Cette course n’est pas adaptée à son profil, il n’a pas très envie de prendre le départ pour le principe, sans pouvoir terminer. On ne peut pas décider pour lui, l’obliger à venir, donc je pense que Biniam ne participera pas à ces championnats au Rwanda. »

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    « Il faut que l’Afrique soit présente »

    Mais il n’y a pas que Girmay et les stars de la catégorie Élite, heureusement. 13 épreuves sont prévues sur la semaine de compétitions et les parcours ne sont pas tous aussi durs. Certaines courses seront plus ouvertes. « Au niveau Élite, ça va être difficile, analyse l’Ivoirien Yao Allah-Kouamé, nouveau président de la Confédération africaine de cyclisme (CAC). Maintenant, au niveau des jeunes, surtout au niveau des dames, il y a encore des possibilités. Donc le message que moi, je vais lancer à votre micro, c’est de faire en sorte que les fédérations africaines fassent en sorte qu’il y ait beaucoup de dames qui viennent à ces Mondiaux-là. Ce sont nos Mondiaux. Ce n’est pas une affaire du Rwanda, c’est une affaire de toute l’Afrique. Il faut que l'Afrique soit présente. »

    Le président de la CAC dit espérer au moins 40 Fédérations africaines en septembre pour des chances de médaille minimes. Reste le plus important peut-être, l’élan.

    L’héritage que ces Mondiaux doivent laisser : un programme de formation supervisé par l'Union cycliste internationale vient déjà d’être inauguré au Rwanda. Il doit pouvoir profiter à tous les coureurs du continent.

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  • En Côte d'Ivoire, l'industrie du clip se modernise [3/3]
    Mar 4 2025

    Grâce aux succès récents et à l'engouement du public, le secteur du clip se structure, mais il est encore loin d’être une véritable industrie et ses acteurs voudraient voir la Côte d’Ivoire suivre le modèle des pays anglophones.

    De notre correspondante à Abidjan,

    Les nouveaux réalisateurs de clips ivoiriens ont voulu imiter ce qui se faisait de mieux chez leurs voisins anglophones, tentant de s'inspirer, notamment, des cartons nigérians, comme « Joro » de Wizkid (2019, 300M de vues), ou « Dumebi » de Rema (2019, 83M de vues).

    « Je m’inspire beaucoup de ce qui se fait au Ghana, confie Young Nouchi, directeur artistique et réalisateur depuis 2020 chez le label Coast 2 Coast, un des précurseurs de ce secteur. J’ai vu que la scène était assez mouvementée là-bas, donc j'ai ramené ça du Ghana. Le réalisateur qui m’a inspiré s’appelle David Duncan, j’ai réussi à taffer avec lui sur plusieurs projets. Dans notre label, on voyage beaucoup, on va faire des clips en France avec des grosses teams, au Ghana… Mais quand tu vois comment ça taffe là-bas et comment ça taffe ici, il y a vraiment une grosse différence. Il y a des bons talents, mais on va dire qu’il n’y a pas vraiment d’industrie. Mais on est sur la voie ! »

    Les clips ne sont jamais rentables à court terme, souligne l’un des pontes du secteur, Sheku Tall, qui dirige Coast 2 Coast, car les chaînes de télévision, les réseaux sociaux et les plateformes vidéo en ligne comme YouTube ne génèrent que peu, ou pas, de revenus.

    « C’est un gros investissement marketing. YouTube ne se monétise que sur des gros marchés, où ils peuvent avoir une régie publicitaire conséquente. Nous, on est un pays de 28 millions d’habitants et donc pas dans leur viseur, analyse Sheku Tall. Le Sénégal, lui, a été monétisé grâce à un Sénégalais qui travaillait chez Google. Le Sénégal était un pays d’art et de lettres depuis le président Senghor, qui a toujours misé sur les artistes plus qu’ici, mais grâce à ce monsieur, ils ont pu monétiser au Sénégal. Donc après, c’est à nos institutions, aux artistes, aux producteurs, c’est à tout le monde de se mettre en marche pour demander la même chose. »

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    « On a encore beaucoup de réalités qui nous fatiguent »

    Plusieurs professionnels du secteur, dont Sheku Tall lui-même, tentent de faire entrer la Côte d’Ivoire sur l’énorme marché que représente YouTube. Mais en attendant, explique-t-il, difficile d’en faire un véritable business : « Je ne dirais pas qu’il y a une industrie, je dirais qu’on tend vers ça, mais qu’on a encore beaucoup de réalités qui nous fatiguent, et qui font qu’on n’est pas bien organisés. On n’a pas de subvention pour les clips, on n’a pas de formations, déplore le professionnel. Sans formation et sans fonds, c’est un peu dur de dire qu’on avance comme une industrie. Mais en termes de publicité, que ce soit pour l’artiste, pour le label, pour la ville où on shoote, c’est des messages forts qu’on lance, et après qui nous reviennent. Finalement, on le reprend quelque part. Peut-être pas dans le modèle économique, mais bon, il suffit d’en créer un ! »

    Abidjan est devenu le décor privilégié des clips de nombreux artistes francophones de la sous-région, mais aussi pour les rappeurs français, de plus en plus nombreux à venir y tourner : Kaaris d’abord, puis plus récemment Niska, Lala &ce ou Laylow. Et si des lieux comme le nouveau pont d’Abidjan sont rapidement devenus iconiques, c’est en partie grâce aux nombreux clips qui y sont tournés.

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  • Côte d'Ivoire: les artistes perfectionnent leurs clips, un atout essentiel pour leur notoriété [2/3]
    Mar 4 2025
    En Côte d'Ivoire, les clips sont devenus un atout marketing de poids pour les artistes. Depuis que le secteur se développe, se modernise et se professionnalise, les labels acceptent d'investir des budgets conséquents pour leur production. De plus en plus de monde se retrouve donc sur les plateaux de tournage, avec des compétences de plus en plus spécialisées. Reportage sur le tournage du clip du dernier titre du jeune rappeur Famous Freaky, produit par le label Coast to Coast. Avec notre correspondante à Abidjan,À première vue, difficile de distinguer ce plateau de tournage de celui d'un film. Réalisateur, régisseur, directeur photo, cadreur, grosses caméras, acteurs et figurants, styliste et maquilleuse... Tout y est. L'artiste à l'honneur, le rappeur Famous Freaky, prend l'exercice très au sérieux. Il sait, dit-il, que le clip est devenu un passage obligé pour valoriser un morceau à haut potentiel :« C'est le clip d'un son qui sort bientôt, dans mon prochain projet. ''DMV Flow'', c'est le titre du son. Je trouve que tous les éléments sont réunis. En tout cas, tous les éléments qui définissent mon style de musique sont dans ce son-là. Le producteur a kiffé, l'équipe a kiffé, donc ils ont voulu qu'on clippe. Pour que la musique s'exporte, déjà, grâce au visuel. C'est important. On ne peut pas juste chanter, et puis, on ne voit même pas qui chante, on ne sait pas qui chante. »Pour coller à l'esthétique du genre musical DMV, un courant de rap originaire des États-Unis, inspiré du New Jersey mais adapté à la sauce ivoirienne, le réalisateur Yann-David Akpa a prévu une grosse voiture et des fumigènes, mais pas seulement : « L'artiste en question sera avec ses gars sur la voiture. Les inspirations sont de Lil Yachty et Kendrick Lamar sur la mi-temps du Super Bowl. Après ça, on aura deux inserts, une chanteuse d'opéra et un violoniste. Tout le monde essaie de se démarquer, par la réalisation, par les clips parce que c'est super important, maintenant. Plus ton clip est bien, plus tu as de vues, plus de personnes parlent de toi. Donc maintenant, je pense que les artistes accordent plus d'importance au clip, et franchement, c'est bénéfique pour nous. »À écouter aussiÉmission spéciale consacrée à l'Histoire du rap ivoire, racontée par Crystelles YohouLe clip passage obligé pour les artistesAlors que les clips à l'ancienne étaient tournés et montés par une ou deux personnes, qui jonglaient avec toutes les tâches, les jeunes professionnels du clip se sont spécialisés grâce à une scène créative qui, à Abidjan, ne cesse de grandir et de s'étoffer, dans l'audiovisuel, l'art et la mode. Le styliste sur ce clip, Yann-Axel Seba, également manager du concept-store Blu Lab, appartient à cette avant-garde :« Moi, ma particularité, c'est que je ne travaille qu'avec des marques africaines. C'est pour ça que j'ai commencé le stylisme, à la base, parce que je trouvais qu'il n'y avait pas assez de marques africaines dans les clips, surtout de rap. On a des marques de Côte d'Ivoire, d'Afrique du Sud, du Nigeria, du Ghana, etc. Elles me prêtent les vêtements pour faire les clips, la plupart du temps. Après, si l'artiste veut, il peut acheter les vêtements, mais la plupart du temps, c'est des prêts. L'artiste porte de beaux vêtements, le réalisateur a ce qu'il veut, moi, je fais mon taf, et la marque gagne en visibilité. Avant, les marques ne pouvaient pas beaucoup se baser sur les clips. Mais aujourd'hui, on remarque qu'il y a de plus en plus de vues sur les clips en Côte d'Ivoire. Du coup, quand tu es une jeune marque, qui a 1 000 abonnés, et que tu apparais dans un clip à deux ou trois millions de vues, c'est déjà une grande visibilité. »Le talent y est, le professionnalisme aussi. Et pourtant, l'immense majorité sont des autodidactes, qui ont appris le métier sur internet, faute de formations adaptées en Côte d'Ivoire.À lire aussiCôte d'Ivoire: quand le tournage de clips vidéo se professionnalise [1/3]
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  • Côte d'Ivoire: quand le tournage de clips vidéo se professionnalise [1/3]
    Mar 3 2025
    Bouba Atkins, Yung Nouchi, Zo Kalanga... Ces noms ne vous disent peut-être rien, mais en Côte d’Ivoire, ce sont les réalisateurs de clips vidéo que les artistes s'arrachent. Depuis quelques années, ils occupent une place centrale sur les réseaux sociaux et à la télévision. Le secteur commence donc à se professionnaliser et à se structurer, tandis que les investissements des labels sont de plus en plus conséquents. Avec notre correspondante à Abidjan, Marine JeanninPhotographie de qualité, chorégraphies soignées, beaux décors, actrices séduisantes… En Côte d'Ivoire, les clips musicaux sont devenus une identité visuelle qui, pour les artistes, compte presque autant que leur musique. Pour certains d'entre eux, c'est d'ailleurs après un clip que leur carrière a décollé. Comme Akim Papichulo, chanteur et compositeur depuis sept ans, révélé l'an dernier par le morceau Amore.« Le clip ''Amore'' m'a permis d'avoir pas mal d'opportunités, reconnaît-il. Parce que quand la qualité de ton clip est bien, il y a des portes qui s'ouvrent, en fait. Parce qu'ils se disent que tu es professionnel, maintenant. Ça pousse les gens à s'intéresser à ce que tu fais. Quand tu écoutes un morceau, tu te dis ''ce morceau, il faut que je le clippe''... Quand tu te dis que c'est un ''banger'', un son qui est ''wow'', un hit, tu le clippes ! »DJ Arafat ouvre la voieLa Côte d'Ivoire est une habituée des clips, devenus un passage obligé pour les artistes depuis les années 1990, quand ils étaient diffusés sur la télévision nationale. Mais dans ces clips à l'ancienne, la qualité n'était pas forcément au rendez-vous. Le réalisateur Bouba Atkins, passé par Blu Magik et Universal, se souvient de ses débuts en 2009, à la grande époque du coupé-décalé. « Les clips, c'était : tu t'arrêtes là, on te filme, tu danses, ou à la limite, tu fais un signe, on colle les images, c'est fini... Ils se contentaient du peu. À partir du moment où ils se voyaient à la télé, c'était suffisant. »À partir des années 2010, DJ Arafat ouvre la voie en mettant plus de moyens dans ses clips, suivi par des grands noms du zouglou comme Magic System et Yodé et Siro. Puis, les producteurs et les artistes de rap Ivoire s'y engouffrent à leur tour. Les premiers clips qui font date sont Anita (2014, 3 millions de vues) et surtout Tu es dans pain (2014, 4 millions de vues) de Kiff No Beat, tous deux produits par Blu Magik. « Les gars étaient étonnés de voir un tel clip ivoirien, réalisé par des Ivoiriens, se souvient en riant Bouba Atkins. Ça les a choqués ! Et là, ça a explosé, il y a des gars qui ont vraiment commencé à s'intéresser à l'audiovisuel. Ces deux clips-là ont vraiment révolutionné tous les clips jusqu'à aujourd'hui. »« Le top 10 ivoirien, ils sont à un million de vues minimum par clip »Depuis cinq ans, la Côte d'Ivoire a vu sa production de clips monter en qualité et en quantité. Ils sont de plus en plus consommés par les Ivoiriens, non seulement à la télévision, mais surtout sur les réseaux sociaux et sur YouTube, souligne le rappeur et producteur Pit Baccardi, gérant du label Gold Prod : « Ce matin encore, quand je me suis réveillé, je suis parti sur les plateformes. Le clip de Didi B, qui est sorti hier, il était à 1,2 million de vues sur YouTube. Le clip de Suspect95, sorti avant-hier, pareil, il était aussi à 1,2 million. Le clip de Himra, un million et des poussières, pareil. Les hommes peuvent mentir, mais pas les chiffres. Le top 10 ivoirien, ils sont au minimum à un million de vues par clip. Il y a cinq ans, on n'était pas à ces niveaux de consommation. »Grâce au clip, un morceau ne s'écoute pas seulement, mais se voit. Pour Pit Baccardi, ces capsules vidéo sont devenues en Côte d'Ivoire « l'atout marketing par excellence ». Parmi les clips récents qui ont marqué la musique ivoirienne, citons Decapo de Tripa Gninin, produit par Yung Nouchi (2021, 1,1 million de vues), Kpaflotage de Suspect95, réalisé par Kouny The Manset (2023, 3 millions de vues), 2025 de Didi B, réalisé par David Nonos (2024, 4,6 millions de vues) et Big Boss de Didi B, le clip le plus cher du rap Ivoire.
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