Pékin a renouvelé les enregistrements qui permettent à des centaines d’installations américaines de porcs et de volailles d’exporter vers la Chine. Malgré les tensions commerciales, les exportations de viande américaine se maintiennent, car Pékin reste fortement dépendante des importations pour nourrir sa population.
La Chine est aujourd’hui le premier importateur mondial de viande, avec environ sept millions de tonnes importées en 2024. Bœuf, porc, volaille : aucune production locale ne suffit à combler la demande d’une population de plus de 1,4 milliard d’habitants.
Malgré son statut de géant économique, la Chine reste structurellement dépendante de ses approvisionnements étrangers. Depuis des années, Pékin tente pourtant de réduire cette dépendance. L’agriculture est régulièrement remise au centre des plans quinquennaux. Mais entre coûts de production élevés, aléas sanitaires et crises récurrentes dans les élevages, la Chine peine à atteindre l’autosuffisance. Résultat : les importations restent non seulement nécessaires, mais stratégiques.
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« Je t’aime moi non plus »Les États-Unis, de leur côté, considèrent le marché chinois comme incontournable. En 2021, leurs exportations agroalimentaires vers la Chine ont culminé à 33 milliards de dollars. Depuis, elles ont légèrement reculé, mais atteignent encore 26 milliards, signe que les échanges restent solides. Et même lors de la guerre commerciale menée par Donald Trump, les flux n’ont jamais été totalement interrompus. Au contraire, ils ont parfois augmenté, comme en 2019, au moment de l’épidémie de peste porcine en Chine.
« Il y a des discours, il y a des postures et il y a le business et les obligations économiques, explique l’économiste spécialisé des marchés agricoles, Jean-Paul Simier. C’est un jeu un peu subtil entre les deux pays, c’est “je t’aime moi non plus”, une forme de dépendance réciproque et un commerce qui continue puisque de part et d’autre, il n’y a pas vraiment d’autres choix. »
Par ailleurs, le monde agroalimentaire américain est l’un des principaux soutiens au président Trump : « C’est donc très délicat pour les États-Unis et très délicat aussi pour la Chine puisqu’il y a des dépendances de l’extérieur pour ces approvisionnements », poursuit-il.
Pékin ne met pas ses œufs dans le même panier Mais Pékin diversifie ses fournisseurs. Le Brésil et l’Australie, leaders mondiaux de la viande bovine et de la volaille, ont gagné du terrain. La Chine ajuste ses achats selon ses besoins et ses messages politiques. Elle taxe plus lourdement les produits dont elle peut se passer et ménage ceux jugés essentiels, comme le soja ou certaines viandes.
Dernier exemple : les enregistrements des exportateurs américains. Pékin vient de renouveler ceux du porc et de la volaille jusqu’en 2030. Mais les autorisations pour le bœuf expirées n’ont pas été reconduites pour l’instant, laissant planer le doute sur une volonté de pression ou de rééquilibrage.
Entre pragmatisme économique et stratégie commerciale, la Chine continue d’importer, mais à ses conditions.
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