1986, la centrale nucléaire de Tchernobyl explose, Daniel Balavoine perd la vie dans un accident d’hélicoptère au Mali, l’Argentine gagne la Coupe du Monde, et la navette spatiale challenger se désintègre à son décollage, ne laissant aucun survivant. Mais cette année-là, la France perd aussi deux de ses plus grands humoristes. Coluche meurt dans un accident de moto, et Thierry Le Luron succombe à une nouvelle maladie qui va faire des ravages dans le monde entier, le SIDA.
Lorsque Thierry Le Luron décède, on en cache dans un premier temps les causes. Personne ne dit qu’il a été victime du SIDA. Car pour beaucoup, c’est un mal honteux. La première personnalité à déclarer publiquement qu’il est atteint de la maladie, c’est l’acteur américain Rock Hudson, lors d’une conférence de presse, le 25 juillet 1985, alors qu’il est hospitalisé à Paris.
D’autres personnalités sont emportées par la maladie : les pianiste et claveciniste Yuri Egorov, Scott Ross ; ou encore ce chanteur extravagant Klaus Nomin qui sera l’une des premières célébrités à être fauchées par le virus. Car dans les années 80, et durant très longtemps encore, on ne survit pas à une infection au SIDA. Très vite, on stigmatise la communauté homosexuelle, qui vit sa sexualité de manière très libérée.
C’est en cette année 1986 que le SIDA est baptisé VIH, virus d’immunodéficience humaine.
Les autorités politiques mettent beaucoup de temps à reconnaître la maladie, tant elle touche des milieux jugés marginaux.
Mais la maladie effraie. Les victimes meurent rapidement, et elle s’étend de plus en plus. On ne sait pas grand-chose de son mode de contamination. C’est une vraie psychose qui s’installe, et dont les communautés gay vont grandement souffrir. On n’imagine pas que les hétérosexuels pourraient aussi attraper cette maladie encore méconnue, et ce n’est que lorsque l’on constate des cas touchant hommes et femmes en Afrique, que l’on se rend compte que la menace pèse sur tout le monde.
Le 20 mai 1983, le virus avait été décrit pour la première fois dans la revue Science, suite aux observations microscopiques des chercheurs Françoise Barré-Sinoussi et Jean-Claude Chermann, sous la direction de Luc Montagnier, qui recevront le prix Nobel de Médecine en 2008. Ces Français de l’Institut Pasteur ont réussi à isoler et identifier le virus, même si une équipe américaine a prétendu l’avoir fait en premier. Quoi qu’il en soit, la découverte va changer les choses, mais lentement.
Aucun traitement n’existe encore. C’est en 1987 que le premier traitement antirétroviral AZT est autorisé aux États-Unis. Il est coûteux et ses effets secondaires nombreux. Le 26 octobre de cette même année, l’ONU vote une résolution visant à unir tous les pays membres de la lutte contre le SIDA. La préoccupation devient mondiale.
Pour la première fois dans l’histoire de la médecine, des malades se réunissent en associations pour s’entraider, ou pour donner leur retour sur les stratégies thérapeutiques. Les victimes participent directement aux discussions sur les protocoles de recherche. Cela a commencé aux États-Unis, en juin 1987, lorsque Larry Kramer crée Act Up en réaction au manque d’intérêt des sphères politiques.
En France, Act Up Paris se crée le 9 juin 1989 par Pascal Loubet, Luc Coulavin et Didier Lestrade.
Actuellement, le SIDA ne se guérit toujours pas. Mais grâce aux avancées médicales, il ne se transmet plus de la mère à l’enfant, ni d’un partenaire à l’autre. À condition que le traitement soit régulièrement pris.
Avec : Nicole Bacharan, politologue spécialiste des États-Unis - Françoise Barré-Sinoussi, immunologue et virologue découvreuse du virus du SIDA - Bernard Campan, humoriste et comédien, membre des Inconnus - Nathan Clumeck, professeur et chef de service honoraire au CHU Saint-Pierre, spécialiste des maladies infectieuses - Marius Colucci, fils de Coluche - Pascal Légitimus – humoriste et comédien, membre des Inconnus - Didier Lestrade, cofondateur d’Act Up Paris - Thomas Snégaroff – journaliste et historien spécialiste des États-Unis.