La viticulture mondiale est mise à l'épreuve face au changement climatique. Par ailleurs, la demande des consommateurs pour les produits sans pesticides se fait de plus en plus sentir. Certains vignerons optent pour les variétés de raisin résistantes à la sécheresse, ainsi qu'aux maladies. Agnieszka Kumor a sillonné les vignobles de France et d’ailleurs. Elle a rencontré notamment les vignerons allemands. Chaque année les producteurs, les distributeurs, les cavistes et les journalistes se pressent au salon ProWein à Düsseldorf en Allemagne. Le plus grand rendez-vous des professionnels de vins et spiritueux au monde a attiré plus de 61 500 visiteurs en 2019. Les organisateurs du salon ne comptent pas s’arrêter là, ce qui affole certains journalistes, critiques de la taille pris par l’événement.Mais pour les autres, ProWein est l’occasion rêvée de rencontrer les producteurs venus des contrées lointaines, comme l’Argentine et la Nouvelle-Zélande, ou plus proches, comme la Moselle allemande.La finesse des rieslings allemandsLa famille Haag cultive ses vignes depuis 400 ans. Le domaine Fritz Haag se trouve à Brauneberg, tout près de la frontière avec le Luxembourg. Pour Oliver Haag, le propriétaire, le vin est avant tout une passion : « Notre domaine est niché au cœur de la Vallée de la Moselle. Les grappes mûrissent lentement. Le style de nos rieslings vient de là. Ils sont frais, légers et élégants. Et contiennent très peu d’alcool. »Réputés pour leur finesse, mais encore peu connus en France, les rieslings allemands sont des cépages rares qui bénéficient du réchauffement climatique : « La Moselle, qui était par le passé une région froide, sort gagnante de cette nouvelle situation. Nos vins n’ont jamais été aussi équilibrés, avec des raisins bien mûrs. Ils sont structurés et profonds d’une part, et de l’autre, ils gardent de la fraîcheur. Mais si l’on regarde la vitesse à laquelle le climat change, un jour ça posera problème, c’est évident », affirme le vigneron de Brauneberg.Éliminer les pesticides des vignesSi plus de soleil contribue à la qualité des rieslings de Moselle, leur style pur et léger à la fois risque de pâtir de la sécheresse. Les millésimes où l’eau manque cruellement sont de plus en plus fréquents. Autre problème que rencontrent les viticulteurs : les maladies de la vigne à l’origine de nombreux traitements chimiques, soupire Dieter Hoffmann. À la tête d’un domaine familial Hoffmann-Simon, il a banni les pesticides de ses vignes.Les cépages résistants aux champignons pourraient l’aider dans son combat. Dieter en a planté quelques-uns à titre expérimental : « Je m’adapte au changement climatique en travaillant plus dans les vignes. J’utilise les engrais verts pour entretenir l’humus. Cette partie supérieure du sol empêche l’eau de s’évaporer J’ai opté pour quelques variétés nouvelles, comme le régent, dont je fais du rosé très fruité. Et il y a deux ans, j’ai planté du cabernet blanc. Ces cépages hybrides n’occupent qu’une petite partie de mon vignoble. Mais le résultat est plutôt encourageant. »Cépage métis ou hybride ?Mais que sont ces cépages hybrides si connus en Allemagne et encore peu répandus en France ? Pour le savoir, nous faisons un détour par Marseille. C’est là que se sont déroulées le 22 janvier 2019 les dernières Rencontres internationales du rosé. Leur thème : le défi du changement climatique et de la transition écologique pour la production de vins rosés de Provence. Nous y avons rencontré Loïc Le Cunf, ingénieur à l’Institut français de la vigne et du vin : « La création variétale signifie utiliser les ressources génétiques des individus qui existent déjà, et les croiser naturellement, d’en faire un papa et une maman, pour obtenir un pépin de raisin qui va se développer. L’idée est d’arriver à sélectionner parmi ces nouveaux individus, des plants qui cumulent les caractéristiques de papa et de maman. » Les gènes de résistance au stress hydrique ou aux maladies de la vigne sont, évidemment, déterminants.Mais tous ces nouveaux plants ne sont pas logés à la même enseigne. Un cépage issu d’un croisement entre deux Vitis vinifera (la vigne cultivée) est un métis, tandis qu’un bébé de Vitis vinifera et de la vigne sauvage (américaine ou asiatique) devient un cépage hybride. « Avec le temps, les variétés résistantes vont prendre énormément de place, car elles permettent de réduire ou d’éliminer complètement le recours aux pesticides. Cette caractéristique répond à une certaine pression sociétale d’aujourd’hui. Moi-même, je vis dans un village et j’ai des enfants. Les épandages d’intrants chimiques dans les vignes autour des écoles, ce sont les choses auxquelles on pense fortement », admet l’ingénieur.Retour à ProWein en AllemagneLa ...