Le 28 mars, un séisme de magnitude 7,7 a frappé le centre de la Birmanie. Ce tremblement de terre, le plus puissant dans le pays depuis plus d'un siècle, a causé l'effondrement de nombreux bâtiments à Mandalay et Naypyidaw, ainsi que des dégâts importants en Thaïlande et en Chine. Le dernier bilan officiel fait état d'au moins 1 700 morts. Où en est la situation sur place ? Christian Lechervy, ancien ambassadeur de France en Birmanie, aujourd’hui envoyé spécial de la France pour la Birmanie en appui des efforts internationaux, répond aux questions de RFI. RFI : Vous étiez en poste jusqu'en 2023. Quelles sont les dernières informations dont vous disposez concernant la situation ce dimanche 30 mars sur place ?Christian Lechervy : On est dans une phase d'arrivée des premiers secours apportés par l'Inde, la Chine, Hong Kong, la Thaïlande, Singapour. Les premiers sauveteurs sont sur le terrain. Ils ont heureusement déjà pu sortir quelques victimes.En parallèle, il y a une évolution sur le terrain sécuritaire. Le gouvernement parallèle a appelé à un cessez-le-feu de ses forces pour les quinze jours qui viennent. Et dans cette logique-là, un certain nombre d'acteurs internationaux, à commencer par les pays de l'Asean, viennent eux aussi de s'engager sur ce type d'appel pour faciliter l'acheminement des secours.La troisième phase, c'est qu'il faut évaluer de manière extrêmement précise l'ampleur des dommages, à la fois sur les biens et les personnes, mais aussi sur les infrastructures de transport qui devront être mobilisées.À lire aussiSéisme en Birmanie: les secours continuent de rechercher des survivants, un bilan très incertainLa junte a appelé à une aide internationale, ce qui n'est pas courant du tout. Mais dans le même temps, on s'aperçoit que les secours, pour des questions administratives, de visas notamment, ont du mal à arriver dans le pays. Comment l'explique-t-on ?Il y a toujours un temps de latence, malheureusement, dans ce genre de situation. Il y a une nécessité de grande coordination. Un certain nombre d'infrastructures aéroportuaires ont subi des dommages très importants, c'est le cas de l'aéroport de la capitale. C'est le cas [aussi] de l'aéroport de Mandalay, qui est vraiment au plus près de l'épicentre. C'est la ville qui a été la plus dévastée.Il y a aussi le peu d'expérience des fonctionnaires de la capitale. Le pays a déjà connu ces dernières années, et j'allais dire ces dernières décennies, des catastrophes de grande ampleur. Il avait déjà été confronté à des difficultés de coordination.Et puis enfin, il peut y avoir aussi des réticences politiques et administratives. On voit malheureusement que, alors que le séisme fait de nombreux dégâts, de nombreuses victimes, les forces armées du régime militaire poursuivent leur offensive sur un certain nombre de terrains et bombardent, y compris des cantons qui ont été malmenés par la croûte terrestre.Justement, cette abondance de soutiens pourrait poser aussi des problèmes dans les zones de conflit ?En tout cas, il y a la nécessité que l'aide parvienne à tous ceux qui en ont besoin. Et ça, c'est une question d'heures. Il y a la nécessité d'avoir une approche réellement humanitaire, et j'allais dire humaniste, de la situation. Et il faut le faire vite parce que dans une catastrophe de ce type, il faut dégager les victimes [des décombres] dans les 72 heures. Au-delà, la survie est quand même très incertaine.Vous en avez parlé, la situation en Birmanie est, depuis des années, compliquée. Ce séisme intervient dans un pays où un conflit dure depuis le coup d'État de 2021. Comment se positionnent sur le terrain le régime militaire, l'opposition insurgée, voire les pays étrangers maintenant ?Le régime militaire met en scène évidemment ses actions, l'opposition également. Il y a une forme de confrontation de communication où chacun cherche à faire valoir ses efforts et les matérialise sur le terrain, avec des dons, avec la mobilisation de ses ressources.Il faut prendre en considération que l'aide humanitaire doit arriver par l'ensemble des territoires, ceux qui sont maîtrisés par le conseil d'administration de l'État et ceux qui sont maîtrisés par des groupes ethniques ou par l'opposition qui a émergé après le coup d'État.La communauté internationale, elle, doit tenir compte aussi de cette réalité, que ce soit au travers des agences des Nations unies, que ce soit au travers des opérations non-gouvernementales, que ce soit au travers des instruments des organisations régionales.
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