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  • Chikungunya à La Réunion: une campagne de vaccination inédite pour contrer l'épidémie
    Apr 9 2025

    Depuis le début de l'année 2025, plus de 27 500 personnes ont déjà été officiellement contaminées le chikungunya, et plus de 6 300 cas ont été enregistrés la semaine dernière sur l'île de La Réunion. Transmis par le moustique tigre, le virus provoque de la fièvre, de fortes douleurs articulaires et parfois des éruptions cutanées. Si les symptômes durent normalement quelques jours, il peut, notamment pour les personnes fragiles, âgées ou atteintes de comorbidité, entraîner la mort. Pour éviter les cas les plus graves, une nouvelle étape vient d'être franchie dans la lutte contre le chikungunya avec le lancement d'une campagne de vaccination.

    Depuis le 7 avril à La Réunion, les pharmaciens et médecins peuvent vacciner contre le chikungunya ; 40 000 premières doses ont été livrées, comme à la pharmacie de La Trinité à Saint-Denis. « Alors ça, c'est le vaccin IXCHIQ. C'est le vaccin qui est préconisé pendant l'épidémie de chikungunya », explique Paul Dumas, pharmacien. Face à cette campagne inédite, il faut rassurer autour du tout nouveau vaccin créé par le labo franco-autrichien Valneva, expliquer par exemple qu'il n'a rien à voir avec le fonctionnement de l'ARN messager utilisé contre le Covid-19. « C'est un virus de chikungunya atténué qu'on injecte au patient, et le patient va développer des anticorps contre le chikungunya. Et après, il sera protégé par rapport à ce virus. »

    Le vaccin protège au bout de 15 jours après l'injection et pour au moins trois ans. Malgré tout, certaines personnes hésitent encore, comme Bernadette : « Je veux parce que j'ai un problème cardiaque, et en même temps, je ne veux pas, car j'ai fait trop de vaccins ces derniers temps. Mon mari va le faire. Lui, il attend ça avec impatience. Il est diabétique, c'est sûr qu'il va le faire. »

    Se faire vacciner par mesure de prévention

    Pourtant, les dix doses quotidiennes réservées dans chaque pharmacie aux plus de 65 ans souffrant de comorbidités trouvent preneurs. Patrick a 76 ans, de l'asthme et un problème aux reins. Il a donc saisi l'occasion de cette injection gratuite avec une ordonnance : « C'est par sécurité. C'est idiot de risquer de tomber malade pour une absence de vaccin. Il existe, alors autant le faire. J'ai mes petits voisins qui ont été contaminés. Ils étaient malades pendant trois jours avec 39°C de fièvre. Je n'ai pas envie de vivre ça. Moi, je crois à la vaccination. »

    Et pour se donner du courage, Patrick est venu avec Cathy : « J'ai 61 ans, je suis la conjointe de Patrick et je voulais me faire vacciner en même temps. Même si je ne suis pas éligible au vaccin, puisque je suis trop jeune et je n'ai pas de comorbidité. Mais bon, j'ai payé mon vaccin et je me fais vacciner en même temps que lui pour éviter de l'attraper éventuellement avant qu'on soit immunisé tous les deux. C'est une sécurité pour nous deux. Et puis bon, j'ai appris que pour les femmes enceintes, c'est compliqué. On a une fille qui va peut-être être enceinte, alors je n'ai pas envie de ramener ça dans son jardin. Je crois que c'est une sécurité pour tout le monde. »

    Le vaccin est coûteux pour ceux qui ne sont pas pris en charge. Prix de vente conseillé : 190 €. Une injection qui, pour l'heure, n'est pas recommandée aux femmes enceintes et aux enfants.

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  • L'impact des data centers à Marseille, hub internet mondial qui se transforme
    Apr 8 2025

    Marseille, deuxième plus grande ville de France... et plus étonnement, sixième hub internet mondial, soit l’un des principaux carrefours du trafic internet. La cité phocéenne vient même de dépasser Hong Kong. Conséquence : les centres de stockage de données numériques (data centers, ou centres de données) se multiplient. L'entreprise américaine Digital Reality a pour projet de s'étendre encore en plein cœur de la ville en y construisant son cinquième centre de données. Mais elle fait face à l'inquiétude des riverains qui craignent des répercussions pour leur environnement.

    Ils sont une trentaine à se réunir devant le futur cinquième data center marseillais. Jean-Pierre Lapebie, président de l'association de riverains Cap au nord, confie : « Ces data centers, en eux-mêmes, consomment énormément d'énergie électrique. Donc ça pose un problème. D'autant plus que ces quartiers manquent d'espaces verts. Il y a une population qui est en souffrance avec une précarité énorme. Et cette population, on la met en dehors de toute discussion ou initiative sur leurs projets collectifs de vie. »

    Installé depuis dix ans à Marseille, Digital Realty, l'entreprise à l'initiative des data centers marseillais, a accepté de nous recevoir pour découvrir ces centres de l'intérieur et comprendre leur impact environnemental. « Voilà un exemple de salle. Vous voyez un certain nombre d'équipements », commente Fabrice Coquio, PDG de Digital Reality, en déambulant dans une salle au milieu de tours électroniques connectées où transitent des datas.

    « Nous colocalisons les investissements informatiques de nos clients pour pouvoir faire en sorte que, demain ou ce soir, vous passez une commande en ligne, vous consultez votre compte bancaire, vous renouvelez votre permis en ligne ou tout simplement, vous envoyez un email à votre grand-mère. » Ces centres de data stockent donc les données d'entreprises. Autre fonction : les mettre en relation. Et ça se passe dans une salle bien moins bruyante. « Et là, vous voyez, sur ces tiroirs à haute densité, on va connecter 24 fois monsieur A avec monsieur B, monsieur C avec monsieur D et ainsi de suite », poursuit le PDG en montrant les outils informatiques.

    « C'est légitime d'avoir des interrogations »

    Des infrastructures qui prennent de la place et nécessitent aussi d'être refroidies. Sur le toit du bâtiment, d'énormes tuyaux et de grosses cuves font le travail : « On est sur la terrasse technique du data center. Vous avez tous ces systèmes de groupes froids. C'est un peu comme le moteur que vous avez derrière votre réfrigérateur à la maison. Sauf qu'ils sont un peu plus gros. »

    Aux inquiétudes des habitants, Fabrique Coquio répond : « C'est légitime d'avoir des interrogations, parce qu'à partir du moment où vous avez des machines informatiques, ça consomme de l'énergie. » Mais il insiste, le projet de nouveau centre de stockage est conforme, notamment au code de l'environnement : « Il faut savoir qu'en France, on ne peut pas faire n'importe quoi, heureusement. De toute façon, vous ne pouvez pas construire un data center si vous n'avez pas d'autorisation. Et après, vous avez des audits, pour vérifier la conformité de votre service. Ce qui est complètement normal. »

    Pour l'instant, rien n'entrave la tenue du projet. Ce cinquième site devrait voir le jour d'ici à 2026.

    À lire aussiMarseille, le port des data centers

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  • En région parisienne, la crise diplomatique entre Paris et Alger vue par les Franco-Algériens
    Apr 7 2025

    Durant huit mois, les Franco-Algériens ont été les spectateurs impuissants de l'escalade diplomatique entre Paris et Alger. En région parisienne, RFI est allé recueillir leurs témoignages à l'occasion d'un projet théâtral monté par Abdelwaheb Sefsaf, directeur du théâtre de Sartrouville.

    Après huit mois d'une crise diplomatique sans précédent entre Paris et Alger, d'escalade, de menaces et de mesures de rétorsion, la France annonce une « nouvelle phase » dans les relations entre les deux pays, après une visite du ministre français des Affaires étrangères à Alger, dimanche 6 avril. Ce n'était évidemment pas la première crise entre les deux pays depuis l'indépendance de l'Algérie en 1962, et les sujets sensibles sont encore si nombreux que cette réconciliation semble fragile. Des tensions récurrentes qui viennent d'abord heurter tous ceux qui ont des liens avec les deux côtés de la Méditerranée ; les Algériens de France, les binationaux, les enfants d'Algériens, tous ceux qui font que les liens entre les deux pays sont indémêlables.

    En région parisienne, tous les vendredis soir, Abdelwaheb Sefsaf, le directeur du théâtre de Sartrouville, anime un atelier pour comédiens amateurs. Sur les 14 participants, les trois-quarts ont des liens avec l'Algérie. Ils ont entre 42 et 65 ans et ont accepté de nous raconter comment ils avaient traversé cette énième crise entre Paris et Alger. « Comme une violence inouïe, parce que cela remet en cause la question de la légitimité », confie d'emblée Mohamed, venu en France à l'âge de huit ans seulement en 1968.

    Malika, dont les parents sont originaires d'Algérie, évoque la mise à l'écart du journaliste Jean-Michel Apathie pour avoir comparé les crimes de l'armée coloniale française en Algérie, à certaines exactions commises par les nazis. « Moi, cela m'a mise très mal à l'aise, et je crois que ce qui m'a fait le plus mal, c'est que tu as une espèce de négation par rapport aux exactions de la France en Algérie », estime-t-elle. Pour nos quatre comédiens amateurs, c'est l'un des plus gros nœuds. Selon eux, la France ne parvient toujours pas à regarder la réalité de son passé en Algérie.

    « Je crois que la difficulté, elle est là : on n'arrive pas à s'entendre sur l'Histoire. Être Algérien, pour les gens, cela veut aussi dire être musulman. On a l'impression d'avoir un double handicap », regrette-t-elle. « C'est la double peine. Tous les musulmans sont attaqués aujourd'hui, mais l'Algérien, c'est la cible. Certains politiciens se sont dit "Voilà, on va toucher l'Algérie", parce qu'ils ont tous des comptes à régler avec les Algériens », estime Mohamed. « J'ai l'impression qu'être Français intégré ou assimilé, c'est renoncer à ses origines. Pour moi, c'est une hérésie », entend-on encore.

    Alors, rien d'étonnant si le projet théâtral que leur a proposé Abdelwaheb Sefsaf les inspire. Il s'intitule Français du futur et ils l'écrivent ensemble. « Si j'ai besoin, moi, de faire ce travail, c'est parce que, quand j'étais enfant, j'étais assez troublé par le fait qu'on me qualifiait, non pas de Français de première génération, mais plutôt d'immigré de seconde génération, comme si mes enfants allaient être des immigrés de troisième génération, et ainsi de suite jusqu'à ne jamais devenir Français » se désespère le metteur en scène.

    Mais c'est aussi son histoire qu'il lui fait dire que Paris et Alger n'ont pas d'autres choix que de se réconcilier. « ​​​​​​​La France a une histoire de 200 ans avec un pays arabe qui s'appelle l'Algérie. On ne peut pas la balayer d'un revers de main. Ce n'est pas possible. C'est d'abord nier l'histoire, c'est insulter la mémoire des disparus. Mais, pire encore, c'est insulter la mémoire des vivants. On tente de réduire l'écartèlement auquel on nous assigne, mais à un moment donné, cela devient intenable », explique-t-il.

    Ainsi, pour ne pas se sentir écartelé, la petite troupe a décidé de se servir de son vécu, de ses richesses, pour dresser ensemble le portrait de ce qu'elle incarne, en partie : le « ​​​​​​​Français du futur ».

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  • France: des travailleurs sans-papiers demandent justice aux géants du secteur des déchets
    Apr 6 2025

    C'est le combat devant la justice française d'une dizaine de travailleurs sans-papiers majoritairement venus du Maroc et d'Algérie. Pendant plusieurs années, de 2019 à 2022, en pleine pandémie de Covid-19, ils ont trié les déchets dans les centres de recyclage de la région parisienne. Exploités par un sous-traitant, ils ont travaillé pour le compte de grands groupes du secteur. Rencontre avec ces travailleurs qui se battent pour leurs droits et leur régularisation.

    Nous sommes devant le Conseil des prud'hommes de Paris, tribunal chargé de régler les litiges en lien avec le droit du travail en France. Ils sont une dizaine à être venus plaider leur cause. Tous ont travaillé pour le compte de NTI, une entreprise sous-traitante spécialisée dans le tri des déchets. Parmi eux, Hind, venue avec sa petite fille : « J'ai travaillé chez NTI pendant trois ans, sans contrat. J'ai trié les déchets sur le tapis alors que j'étais enceinte. J'ai dû travailler la nuit jusqu'à l'accouchement. Aujourd'hui, ma fille à trois ans demi. »

    NTI a été placée en redressement judiciaire il y a bientôt deux ans. Mais ces anciens employés demandent réparation aux donneurs d'ordres Veolia, Suez, Paprec, pour le compte desquels ils ont effectivement travaillé. Pour leur avocate, Me Katia Piantino, les géants du secteur du déchet ont volontairement fermé les yeux :

    « Le Code du travail demande aux donneurs d'ordres de vérifier que son sous-traitant ne commet pas de travail illégal. Cela veut dire qu'il n'emploie pas de travailleurs étrangers sans titre et ne commet pas de travail dissimulé. On leur demande de ne pas ignorer, parce que, ce qui ressort du dossier, c'est qu'ils ont profité d'une main-d'œuvre hyper bon marché du sous-traitant NTI, qui a raflé tous les contrats de sous-traitance dans le secteur. Pourquoi ? Parce que la main-d'œuvre était vachement moins chère... Bizarrement, puisqu'elle n'était pas déclarée. »

    Heures supplémentaires non payées

    Les travailleurs de l'ombre décrivent un système où ils étaient totalement captifs. L'un d'eux confie : « J'ai travaillé cinq ans au noir, dans l'incinération, dans les fours. Parfois, je travaillais la journée, la nuit. On travaillait sans formation, on faisait des heures supplémentaires sans être payés. On n'a pas eu droit au chômage, on ne pouvait pas refuser un travail. Parfois, ils nous appelaient la nuit pour commencer le matin. Et si tu refusais, tu n'avais pas de travail le mois d'après. »

    Ali Chaligny, représentant syndical CGT chez Veolia qui les accompagne, ne veut pas résumer le problème à celui d'un simple patron voyou. Lui aussi dénonce un véritable système : « Ce sont des métiers en tension où les entreprises ont du mal à recruter, et du coup, il y a une délocalisation de la masse ouvrière des salariés. Étant donné que l'on ne peut pas délocaliser nos activités de collecte et traitement des déchets ménagers, pour pallier ce manque de main-d'œuvre, on délocalise les salariés en France pour assurer ces services essentiels à la nation. »

    La justice attendra encore quelques mois. L'audience a finalement été reportée au 26 septembre 2025.

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  • France: à la mode parmi les jeunes, le tricot constitue une manière de consommer plus durable
    Apr 3 2025

    D'après une étude OpinionWay publiée en 2022, plus d'un tiers des Français de moins de 35 ans disent tricoter. Tutoriels sur les réseaux, ateliers dans les cafés, les occasions d'apprendre se multiplient. Illustration dans un café parisien où RFI a pu assister à un cours gratuit. Ici, on fournit la laine et les aiguilles, les débutants sont bienvenus.

    Comme chaque mercredi, Perrine explique les rudiments du tricot chez Cortado, un café du Marais, dans le centre de Paris. Ce soir, le cours affiche complet. Pour Lalie, 21 ans, pas question de louper l'événement. « J'ai vu un truc sur les réseaux. Je me suis dit : "mais moi aussi, je veux en être". J'ai activé les notifications parce que j'ai vu qu'il fallait réserver puisqu'il y allait avoir beaucoup de monde. Dix minutes avant le lancement de la billetterie, j'étais sur Instagram en train d'actualiser la page. Voilà, on dirait un concert, mais c'est juste un atelier tricotage », plaisante-t-elle.

    Ici, la moyenne d'âge est de 25 ans environ, surtout des filles, mais aussi quelques garçons. Comme Hugo, qui assiste à son premier cours : « Je fais de la sérigraphie, je travaille dans la mode et je trouvais cela intéressant. J'ai toujours dit non quand ma grand-mère voulait m'apprendre. Et là, je me suis dit : "pourquoi pas ?" On parle avec d'autres gens, qui sont très forts et moi très nul. On rencontre des gens, on boit un café ou un petit verre de vin et on fait du tricot. C'est le parfait mélange, après le travail », estime-t-il.

    C'est pendant le confinement que le tricot a amorcé son grand retour. Une tendance très vite reprise par les influenceurs et qui depuis ne perd pas de vitesse. La preuve : aujourd'hui, le mot-dièse « #knitting », c'est-à-dire tricot en anglais, totalise plus de 27 millions de publications sur Instagram. Pour les jeunes générations, tricoter c'est devenu « cool » et cela réjouit Perrine qui anime l'atelier.

    « Ce n'est pas du tout à la mode, à l'époque, quand même, quand j'ai démarré. J'ai 60 ans, j'ai pris l'habitude de dire que je n'ai pas eu de petit copain, mais que je tricote. Maintenant, c'est tendance. Je suis très contente qu'il y ait plein de gens qui veulent tricoter. Je pense que ce n'est pas juste un phénomène comme cela, qui va durer deux mois. C'est aussi lié aux problèmes de consommation à outrance. Ils viennent tous avec l'idée, je pense, de se faire quelque chose, un jour », raconte-t-elle.

    Au cours de Perrine, tous les rêves sont permis. Même pour Alice, qui commence tout juste une nouvelle pièce. « Moi, c'est très basique, c'est un cache-cou pour l'instant. Mon rêve ultime : je crée mon pull et je vais à la Fashion Week », déclare-t-elle, amusée. En plus de la satisfaction de créer quelque chose de ses mains, le tricot a d'autres vertus.

    Selon une étude OpinionWay publiée en 2022, 75 % des tricoteurs déclarent être plus heureux depuis qu'ils manient les aiguilles. C'est le cas de David, un tricoteur assidu, en pleine réalisation d'un grand sac en maille vert et blanc. « Quand je commence à le faire, je commence à oublier toutes mes autres préoccupations. Je suis tellement concentré sur le fait de faire chaque point correctement que j'entre dans une étape de plénitude », confie-t-il. À vos pelotes, donc. Vous avez encore deux mois pour vous entraîner avant la Journée mondiale du tricot, le 8 juin prochain.

    À écouter aussiAccents d'Europe: en Bosnie, se reconstruire par le tricot

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  • La montée en cadence de l'usine KNDS, fabricant du canon Caesar, symbole de l'économie de guerre
    Apr 2 2025

    « Nous entrons dans une économie de guerre », voilà ce qu'annonçait le président français Emmanuel Macron mi-2022. Désormais, trois ans après le début de l’invasion russe en Ukraine, l’Europe veut aussi prendre son indépendance militaire vis-à-vis des États-Unis de Donald Trump, qui se sont rapprochés de la Russie. Dans ce contexte, l’Union européenne prévoit de mobiliser jusqu’à 800 milliards d’euros d’ici à 2030. Alors comment l’industrie s’adapte-t-elle ?

    Ce qui frappe d’abord en arrivant à l’usine, ce sont les travaux d’agrandissement en cours. Là, un hangar provisoire. Ici, un trou de plus de deux mètres de profondeur sur plus de 100 mètres carrés pour faire place à de nouvelles machines. « On est dans la dernière canonnerie de France », explique Gabriel Massoni, porte-parole du groupe franco-allemand KNDS, leader européen de l'artillerie. Sur l'ensemble des munitions fabriquées par le groupe en France, 90 % partent en Ukraine. Mais aussi beaucoup de canons Caesar, qui sont faits en partie dans cette usine.

    Dans l'usine, l'économie de guerre est une réalité depuis le début de l'invasion russe. « On a investi 600 millions d'euros en fonds propres depuis trois ans, pour tripler la production de canons Caesar et d'obus de 155 mm qui sont tirés par le canon Caesar. On a recruté, on a acheté des machines, on est en train de pousser les murs, donc on a cette expérience de l'économie de guerre », affirme le parole-parole.

    Avant 2022, le groupe fabriquait un à deux canons Caesar par mois. Aujourd'hui, c'est six par mois. De longs tubes de métal de plusieurs mètres de long, usinés pas au millimètre, mais au micromètre près. Kévin travaille ici depuis dix ans. Il a vu les effectifs passer de 120 à 200 personnes et la cadence s'accélérer. Nous ne pouvons pas donner son nom de famille pour des raisons de confidentialité. « Ça a doublé au niveau effectif dans la ligne depuis que je suis arrivé. Et avec l'augmentation [de la production, NDLR], on a eu des demandes pour venir travailler les samedis matin aussi sur la base du volontariat », détaille-t-il. Sur sa ligne, où sont fabriqués les tubes de futurs canons Caesar, les salariés travaillent en trois huit, ce qui n'a pas toujours été le cas. Une dizaine de nouvelles embauches sont prévues cette année.

    L'entreprise, qui avant s'appelait Nexter, a demandé à ses fournisseurs, plus de 2 000, d'accélérer aussi la cadence. « Tous nos fournisseurs, on les accompagne. Il ne s'agissait pas que KNDS soit en capacité de fabriquer huit canons par mois et que nos fournisseurs restent à une capacité de trois ou quatre », témoigne Laurent Monzauge, chef d'établissement KNDS à Bourges. Dans certains cas, le groupe a avancé de la trésorerie. Il a aussi parfois dû changer de fournisseurs.

    Aujourd'hui, les carnets de commande du groupe sont pleins pour trois ans. Et avec la hausse annoncée des dépenses militaires en Europe, ils pourraient encore se remplir davantage. L'industrie de la défense emploie près de 200 000 personnes en France, entre emplois directs et indirects.

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  • Image écornée et propriétaires embarrassés, les reventes de Tesla se multiplient sur le marché de l'occasion
    Apr 1 2025

    Désamour passager ou début d’un véritable déclin ? Les ventes de voitures Tesla en Europe ont été divisées par deux en un an. Sur le marché de l’occasion, les annonces fleurissent depuis janvier. Une tendance difficile à interpréter, entre renouvellement de la gamme du constructeur, concurrence accrue et rejet d’Elon Musk. Certains consommateurs sont rebutés par les prises de position du patron de Tesla, l'un des plus proches conseillers de Donald Trump à la Maison Blanche.

    Se séparer de sa Tesla, Alberto, qui travaille dans un quartier de bureaux au nord-ouest de Paris, y songeait depuis le rachat de Twitter, devenu X, par Elon Musk. C’est désormais chose faite. « J'ai vendu ma Tesla modèle Y en fin d'année 2024. L'élection de Donald Trump et l'implication de Musk dans la campagne électorale et ce qui en a suivi a fini de me décider. En tout cas, cela ne veut pas dire qu'un jour ou l'autre, si Musk n'est plus à la tête de Tesla, je ne retournerai pas chez Tesla. Mais à date, je pense qu'on ne peut pas cautionner ce qu'il fait », explique-t-il.

    Une opinion partagée par Adrien, qui jette un regard quelque peu désenchanté vers sa voiture. Il a décidé de la vendre pour des raisons personnelles. Mais s’il n’a pas encore choisi son prochain véhicule, pour lui, une chose est sûre : « Je n'achèterai pas de Tesla. Avec la place qu'a prise Elon Musk dans l'actualité, toutes ses idées, cela ne passe pas vraiment. Financer son idéologie de fou furieux, c'est très compliqué. »

    Ils étaient pourtant attachés à la marque. C’est l’intérêt d’Alberto pour l’innovation technologique qui l’avait persuadé d’opter pour le constructeur, il y a quatre ans. « J'étais plutôt convaincu par le concept qui avait plutôt l'image d'une marque avant-gardiste, en avance sur tous les autres », selon lui. Une image aujourd’hui écornée. Cyrille, collègue d’Alberto, qui vend sa Tesla achetée d’occasion il y a un peu plus d’un an, peut en témoigner : « On est passé de "bobo écolo" à limite d'extrême droite "nazi". »

    Rayures, jets de peinture, incendies… Certains véhicules Tesla ont été ciblés par des militants anti-Elon Musk. Des évènements qui comptent aussi dans la décision de boycotter la marque. « Il y a aussi la crainte de se faire abîmer la voiture et qu'elle soit peut-être un peu moins vendable plus tard. Ce qui nous donne un peu raison, quand on voit tout ce qui concerne les prix de revente, le nombre d'annonces », abonde Alberto.

    Trop de voitures alors que la demande recule. Sur Leboncoin, plateforme de petites annonces, le prix moyen des Tesla a baissé d’environ 3 000 euros depuis janvier. « Avec tout ce qui se passe et le bashing de Tesla, la cote a beaucoup baissé. À l'heure actuelle, elle est cotée approximativement 28 000 euros par la cote Argus, la cote officielle. Et à titre d'exemple, j'ai une concession BMW qui me propose une reprise à 17 000 euros. Donc, pour moi, ce n'est pas possible. », regrette Cyrille. Revendre sa voiture par désaccord avec Elon Musk, oui, mais pas à n’importe quel prix ! Cyrille a finalement décidé de garder son véhicule encore quelque temps, en espérant que le marché reprenne des couleurs.

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  • À Paris, la communauté malgache se rassemble pour fêter son Nouvel An
    Mar 31 2025

    Les Malgaches de la diaspora ont fêté leur Nouvel An, samedi 29 mars 2025. Et pour cette deuxième édition, un festival leur était dédié à la REcyclerie, dans le XVIIIe arrondissement de Paris, un lieu écoresponsable qui met en avant depuis deux ans cet événement. Un espace dans lequel, pendant trois jours, cette diaspora, qui représente plus de 180 000 Malgaches en France, s'est retrouvée. Au menu : des conférences, une exposition photographique, un espace livres, des projections documentaires, des rencontres avec plusieurs collectifs, des musiques, des contes... Il y en avait pour tous les goûts.

    Le Nouvel An malgache repose sur le calendrier lunaire, comme l'explique Hobi Rakotoson : « Il faut savoir que le Nouvel An malgache change d'une année à l'autre, puisqu'on est sur un calendrier lunaire. Mais le 29 mars est aussi la commémoration du 29 mars 1947, l'insurrection malgache contre la domination française. C'est l'un des moments phares de la lutte anticoloniale malgache. C'est donc une date importante qui coïncide avec le Nouvel An malgache. Être ici aujourd'hui, c'est très symbolique. »

    Un Nouvel An engagé selon l'organisatrice de ce festival, Audrey Randriamandrato, à la tête de l'association Malagasy Women Empowerment : « Ce festival est aussi un moyen pour toutes les personnes qui œuvrent pour Madagascar de valoriser ce qu'elles réalisent sur le terrain. C'est ce que nous faisons aujourd'hui : réduire l'écart d'information entre ce que les gens savent de Madagascar ici et ce que vivent ceux sur le terrain », explique l'organisatrice.

    « Nous y parvenons en organisant des ciné-débats, par exemple. Certains films sont interdits de diffusion à Madagascar, mais nous continuons à soutenir les réalisateurs et le cinéma malgache. Nous organisons aussi d'autres activités, comme des conférences, pour permettre à la diaspora, notamment ceux qui ne retournent plus à Madagascar ou qui ne s'engagent pas nécessairement, d'avoir les informations nécessaires et éclairées sur la situation actuelle du pays », poursuit-elle.

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    Un festival qui crée des ponts et des liens

    Kalina, présente pour ce Nouvel An malgache 2025, constate : « Franchement, mon pays me manque. J'ai juste envie de dire ça. Venir ici est très enrichissant. On a de la chance d'avoir ce genre d'événements ici, avec autant d'associations. »

    Hobihasina Rakotoson, ingénieure de formation, a mis son métier entre parenthèses. Elle valorise la culture malgache à travers son entreprise Lamako, qui crée des jeux de société. « Souvent, on nous dit : "Ah, mais tu es malgache, mais tu ne parles pas malgache ?", "Oh, tu es malgache, mais tu as un accent" ou encore "Tu as vécu à Madagascar, mais tu n'as pas appris à parler malgache ?", constate-t-elle. Ce sont de vraies problématiques auxquelles nous, la diaspora, ou même des personnes ayant vécu là-bas, faisons face. Le but, c'est de permettre de faire un pas vers la culture malgache à travers la langue. L'idée est de débloquer cette barrière pour embrasser son identité, sa culture, ses origines et découvrir Madagascar. »

    Il y a aussi des histoires de princesses et de princes avec Hanta Raharimamonjy, la conteuse. Et il est temps, en cette nouvelle année, de faire des vœux…

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